Déclaration

UniEs pour la santé

Une manifestation pour lutter contre les inégalités dans le système de santé

Un système de santé public, accessible et universel est un rempart contre les inégalités et constitue l’une des pierres angulaires d’une société valorisant la justice sociale. Ce système doit être défendu face aux mesures d’austérité imposées par le gouvernement actuel.

Depuis les années 1980, l’imposition successive de coupures budgétaires et de réformes des méthodes de gestion par les gouvernements de toutes allégeances menace de plus en plus le caractère public du système de santé. Dans une dérive autoritaire sans précédent, la centralisation accrue des pouvoirs sous le règne du Parti libéral du Québec et de son ministre de la santé, Gaétan Barrette, a fortement contribué à l’effritement accéléré du régime public. 

En fragilisant graduellement le système public, les élites au pouvoir ouvrent toujours davantage les vannes à la privatisation de la santé. L’organisation actuelle des soins professionnels en première ligne, avec les nombreux trous de services existants et les conditions de travail difficiles, a essentiellement favorisé le développement du secteur privé. Dans les CHSLD et les soins à domicile, les compressions budgétaires draconiennes ont tellement réduit l’accessibilité des soins que nombre de personnes doivent désormais se tourner vers le privé pour obtenir certains services essentiels. Pour les soins de longues durées, les soins de réadaptation, la psychothérapie et bien d’autres services de santé, l’accès aux professionnelLEs de la santé est devenu plus facile au privé qu’au public, pour qui peut se le payer évidemment.

Nos collègues commis, infirmières, inhalothérapeutEs, préposéEs, technicienNEs et travailleuses sociales du système public sont démoraliséEs et épuiséEs par des méthodes de gestion qui déshumanisent les soins et ne leur donnent plus les moyens d’offrir les services de qualité comme elles-ils le voudraient. D’autre part, les travailleuses et travailleurs des services de la conciergerie et de l’alimentation de nos institutions doivent composer avec une très grande précarité.

Alors que nos collègues subissent des conditions de travail très difficiles et que nos patientEs n’ont pas toujours accès aux services de santé dont ils-elles ont besoin, la seule chose qui semble être immune aux coupes est notre rémunération !

Ça suffit! Il faut absolument renverser la vapeur. InspiréEs par nos collègues infirmières qui ont courageusement tenu tête au mépris du ministre Barrette en dénonçant leurs conditions de travail souvent inhumaines, nous croyons qu’il est temps de passer de la défensive à l’offensive en revendiquant non seulement la cessation des coupures et de la centralisation des pouvoirs au sein du ministère de la Santé, mais aussi en proposant des changements concrets afin que notre système de santé soit réellement public, accessible et universel. Contrairement aux déclarations blessantes et insultantes du premier ministre, nous croyons qu’il est possible de redistribuer les ressources du système de santé québécois afin de promouvoir la santé de la population et répondre aux besoins des patientEs, sans pour autant devoir pousser les travailleuses et travailleurs de la santé au bout du rouleau (1).

ConvaincuEs de l’importance d’un système de santé public fort, nous rejetons les récentes hausses de rémunération négociées par nos fédérations médicales et soutenons une mobilisation générale des professionnelLEs de la santé et des citoyenNEs afin d’exiger une distribution juste et équitable des ressources en santé, au bénéfice de toute la population québécoise. 

Ainsi, nous appelons toute la population à se joindre à nous pour une manifestation sous la bannière « UniEs pour la santé » qui débutera à la Place Émilie-Gamelin, le samedi 24 mars 2018 à 13 h.  

Nous revendiquons :

1) L’annulation des hausses de la rémunération des médecins, ainsi qu’une consultation publique sur les modalités de rémunération et les montants octroyés aux médecins par la société québécoise.

La rémunération des médecins accapare déjà une part importante des budgets en santé, au détriment de l’offre de services aux patientEs et des conditions de travail des autres travailleuses et travailleurs de la santé. Dans un contexte où on n’alloue pas suffisamment de fonds à de nombreux secteurs du système de santé public, cette hausse supplémentaire est particulièrement indécente et met en lumière la nécessité de réévaluer la pertinence des modes de rémunération actuels.

2) La reconnaissance et la valorisation de toutes les personnes travaillant dans le domaine de la santé, en solidarité avec leurs luttes pour des conditions de travail dignes et épanouissantes.

Cette reconnaissance doit se traduire par des postes et une rémunération dignes, des conditions de travail épanouissantes pour tous-tes, dans le cadre d’une approche interdisciplinaire et intégrée des soins de santé. Ceci est particulièrement nécessaire pour celles et ceux qui occupent des postes sous-valorisés au sein du système de santé, souvent des femmes, des travailleurs-euses migrantEs/raciséÈs et vivant dans la précarité.

3) Un réinvestissement dans la santé publique et dans l’élargissement du panier de servicescouverts par le régime d’assurance maladie pour y inclure les soins psychologiques, les soins dentaires, les soins oculaires, les soins de réhabilitation (physiothérapie, ergothérapie, orthophonie, audiologie et tous les autres) ainsi qu’un système d’assurance-médicaments public, gratuit et exhaustif. 

Le rôle essentiel et complémentaire de l’ensemble des travailleurs-euses de la santé n’est plus à démontrer dans la prise en charge globale des problèmes de santé. Les ressources professionnelles actuellement disponibles sont nettement insuffisantes pour répondre aux besoins de la population et il existe de nombreux trous de services affectant particulièrement les communautés les plus vulnérables. Le recours au privé en santé renforce les iniquités dans l’accès et la qualité des soins et services. Il est essentiel d’inclure une offre publique de soins professionnels au sein du réseau de première ligne afin d’assurer un accès universel indépendamment du revenu.

4) L’accès à des soins de santé de qualité pour toutes les personnes vivant sur le territoire québécois, particulièrement les personnes vulnérables et marginalisées qui en sont privées pour des raisons structurelles.

Tout le monde n’est pas égal face au système de santé. Les barrières structurelles d’accès aux soins affectent de manière disproportionnée les migrantEs à statut précaire, les personnes autochtones, les personnes en situation d’itinérance, les membres des communautés LGBTQ+, les personnes en situation de handicap, les communautés racisées, les personnes incarcérées et d’autres populations marginalisées. Perte de confiance dans le réseau, stigmatisation et préjugés, méconnaissance du système, incapacité à remplir les exigences administratives, exclusion de la couverture médicale, ressources mal-adaptées, déserts médicaux etc, les obstacles à l’accès aux soins de santé sont nombreux et doivent être éliminés si l’on souhaite que notre système de santé public soit réellement universel et accessible. 
Cette manifestation est non-partisane. Nous demandons aux groupes qui se sentent concernés par le sujet d’appuyer la manifestation : groupes communautaires, syndicats, regroupements de travailleuses et travailleurs, associations professionnelles et étudiantes, groupes de défense des patientEs et comités d’usagers.

Nous reconnaissons que les médecins prennent trop souvent l’avant-plan dans l’espace public sur les enjeux de santé. Nous souhaitons donc prioriser les interventions de nos collègues et des citoyenNEs durant cette manifestation.

Pour exprimer votre appui à la manifestation « UniEs pour la santé », contactez-nous à l’adresse courriel uniespourlasante@gmail.com.

Nous souhaitons également souligner que cette manifestation se veut familiale et festive : bienvenue à tous et à toutes!

Solidairement,
Le conseil d’administration de Médecins québécois pour le régime public (MQRP)
Le sous-comité « manifestation » de Médecins québécois pour le régime public (MQRP)

(1) « Voyez-vous, on est dans un système public où tout le temps — à l’avenir également — les ressources [ne] sont pas au même niveau que les besoins. Ça va toujours être le cas dans le domaine de la santé. Donc, les gens […] sont toujours poussés au maximum. C’est admirable. »  (31 janvier 2018)